Sur Malt, il y a 300 planneurs stratégiques en freelance mais aucune vérification sur les études, le parcours professionnel, les compétences. LinkedIn va bientôt lancer une market place pour aider les freelances a trouver des missions.
Dans la Bay area les planneurs stratégiques ont formé une communauté d'entraide.
A nous, de lancer notre plateforme de mise en relation avec les entreprises !
Le projet :
Une plateforme de mise en relation avec des freelances pour monter sur des missions.
Une communauté de planneurs stratégiques pour s’entraider
Des outils et des formations pour démocratiser et structurer notre métier
Comment proposer la meilleure architecture possible en utilisant les ressources disponibles, voire moins? par José Tomás Franco
En 1978, les écologistes australiens David Holmgren et Bill Mollison ont inventé pour la première fois le concept de la permaculture comme méthode systématique. Pour Mollison, « la permaculture est la philosophie de travailler avec et non contre la nature, après une observation longue et réfléchie ». [1] Holmgren, pour sa part, définit le terme comme « ces paysages consciemment conçus qui simulent ou imitent les modèles et les relations observées dans les écosystèmes naturels ». [2]
En 2002, Holmgren a publié le livre Permaculture: Principles and Pathways Beyond Sustainability , définissant 12 principes de conception qui guident la génération de systèmes durables. Ces principes peuvent s’appliquer à tous les processus que nous menons quotidiennement dans le but de les humaniser, d’augmenter leur efficacité et d’assurer la pérennité de l’humanité .
Que se passe-t-il si nous les appliquons au processus de conception d’une œuvre architecturale?
« En prenant le temps de nous engager pour la nature, nous pouvons concevoir des solutions adaptées à une situation particulière. » – David Holmgren
Selon Holmgren, ce premier principe est centré sur l’observation de la nature, afin de comprendre les éléments qui composent le système dans lequel nous travaillons, avant d’agir sur lui. Les tentatives pour vraiment comprendre et nous engager dans la situation à laquelle nous devons faire face doivent naturellement nous conduire à une réflexion profonde qui nous permet d’apporter une réponse adéquate .
En architecture, avant de s’asseoir sur le design, il faut se demander: de quoi a réellement besoin l’utilisateur du projet que je conçois? Quel est le contexte autour de cela? Comment répondre à ce besoin de la manière la plus efficace et la plus appropriée possible?
Le fait de se connecter avec l’utilisateuret d’interagir avec le contexte du travail facilitera le processus conscient de nous engager à la commande reçue. Nous aurons moins d’occasions d’emprunter la mauvaise voie sur la base d’hypothèses erronées et nous serons obligés de respecter leurs circonstances préexistantes et leurs circonstances spécifiques. Un bon projet architectural devrait facilement émerger si nous sommes attentifs aux «indices» qu’il nous donne. Enregistrez cette image dans vos favoris
De quoi a réellement besoin l’utilisateur du projet que je conçois? Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 02: CAPTURE ET STOCKAGE DES RESSOURCES
« En développant des systèmes qui stockent les ressources lorsqu’elles sont abondantes, nous pourrons les utiliser en cas de besoin. » – David Holmgren
La fièvre «verte» que nous avons connue en architecture il y a quelques années aujourd’hui repose sur une durabilité associée plutôt à des méthodes passives , dans le but d’atteindre une véritable efficacité de toutes les manières possibles. Cependant, au-delà des «techniques durables» qui peuvent être appliquées efficacement, une question attentive à ce principe pourrait être: comment proposer la meilleure architecture possible en utilisant les ressources disponibles, voire moins?
Malgré le fait que notre architecture elle-même puisse fonctionner comme un système qui capture, stocke et utilise les ressources disponibles – le vent, la chaleur du soleil, l’eau de pluie – en notre faveur, notre responsabilité en tant qu’architectes ne devrait pas se limiter à ces «méthodes».
Nous devons être conscients que chaque ligne que nous traçons dans notre avion a un coût associé, une empreinte . Il ne sert à rien d’ériger de grands gratte-ciel remplis de panneaux solaires, si leur construction à elle seule génère un énorme gaspillage de ressources et une série d’externalités négatives dans d’autres domaines.
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Avec l’aimable autorisation de José Tomás Franco
Principe 03: OBTENIR UNE PERFORMANCE
« Assurez-vous que vous recevez des récompenses vraiment utiles dans le cadre de votre travail. » – David Holmgren
Dans ce principe, Holmgren commente que « vous ne pouvez pas travailler à jeun », garantissant que nous devons obtenir des récompenses immédiates afin de nous soutenir. Il ajoute que les systèmes conçus doivent produire des fruits qui garantissent la survie de la communauté sans risquer son avenir , et que la productivité doit être mesurée en termes de produit réel de l’effort investi.
Au-delà du paiement monétaire que nous recevons pour notre travail, totalement juste et nécessaire, notre performance et notre productivité en tant qu’architectes devraient être mesurables par rapport à toutes ces externalités positives que nos projets génèrent .
Une œuvre d’architecture a la capacité d’influencer grandement le contexte dans lequel elle est construite, et nous ne pouvons pas manquer l’occasion d’identifier et de développer – dans la mesure du possible – ses avantages potentiels . Un projet qui remplit nos poches mais qui ne «cède» pas de manière positive, ou pire encore, qui nuit à son environnement ne peut pas être durable. Enregistrez cette image dans vos favoris
Notre performance et notre productivité en tant qu’architectes doivent être mesurables par rapport à toutes ces externalités positives que nos projets génèrent. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 04: APPLIQUER L’AUTORÉGLEMENTATION ET ACCEPTER LA RÉTROACTION
« Les activités inappropriées doivent être découragées pour garantir que les systèmes peuvent continuer à fonctionner correctement. » – David Holmgren
Ce principe est représenté par la planète Terre, avec l’idée de nous montrer le plus grand exemple visible d’un «organisme» autorégulé et soumis à des contrôles de rétroaction, tels que le réchauffement climatique. Le proverbe utilisé pour le décrire suggère que cette rétroaction négative met généralement du temps à émerger et que les répercussions de nos actions ne sont pas immédiatement visibles .
Dans le cas de l’architecture, nous sommes généralement prêts à concentrer nos conceptions sur le présent, mais à ne pas trop penser à ce qui leur arrivera à l’avenir. Il est logique de le faire de cette façon, car il nous est demandé d’adapter notre travail à un utilisateur et à un contexte particuliers, avec des besoins et des exigences qui sont pertinents aujourd’hui. Comment alors se débarrasser d’un avenir imprévisible et défavorable?
La clé consiste précisément à « autoréguler » ce que nous projetons, afin de décourager, d’éviter ou de repenser toutes ces réponses de conception (et / ou activités connexes) qu’au moins aujourd’hui, si nous pouvons identifier comme inappropriées .
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La clé est d ‘«autoréguler» ce que nous projetons, afin de décourager toutes ces réponses de conception que, au moins aujourd’hui, si nous pouvons identifier comme inappropriées. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 05: UTILISATION ET VALEUR DES RESSOURCES ET SERVICES RENOUVELABLES
« En faisant un meilleur usage de l’abondance de la nature, nous pouvons réduire notre comportement de consommateur et notre dépendance à l’égard des ressources non renouvelables. » – David Holmgren
À ce stade, l’appel est de laisser la nature suivre son cours, autant que possible , et Holmgren nous donne un exemple quelque peu extrême mais assez clair pour comprendre sa profondeur. Le bâtiment de l’Institut argentin de permaculture a été conçu et construit avec de la paille et de la terre, des matériaux qui, s’ils ne sont pas entretenus – pour permettre la vie à l’intérieur – reviendront lentement sur terre. Son impact est minime et sa durée de vie est directement associée à son utilisation.
C’est un principe difficile à appliquer car nous sommes habitués et formés à utiliser des matériaux, des systèmes et des processus à base de combustibles fossiles (non renouvelables), mais au moins cela nous met au défi d’incorporer le plus de ressources pouvant être restaurées à un rythme supérieur à celle de sa consommation .
Le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité, la géothermie, la biomasse et les biocarburants peuvent être des options efficaces à explorer pour permettre à nos projets de fonctionner hors réseau; tandis que certains matériaux renouvelables tels que l’ adobe , le liège, la paille et le bambou peuvent devenir de bonnes alternatives s’ils sont bien appliqués. Le bois produit par des techniques forestières durables peut également être ajouté à cette liste. Enregistrez cette image dans vos favoris
L’enjeu est d’intégrer la plus grande quantité de ressources pouvant être « restaurées à une vitesse supérieure à celle de la consommation ». Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 06: PRODUIRE SANS DÉCHETS
« En valorisant et en utilisant toutes les ressources dont nous disposons, rien n’est perdu. » – David Holmgren
Ce principe repose simplement sur l’utilisation de toutes les ressources dont nous disposons, en évitant le gaspillage matériel. Il est facile de «gaspiller» lorsque nous sommes en abondance, mais que ferions-nous si nous n’avions pas d’entrepôts remplis de matériaux de construction pour élever nos projets?
Nous avons grandi dans un monde de gaspillage, et dès les premiers mois à l’université, nous avons commencé à dépenser plus que nécessaire. Semaine après semaine, nous réalisons des modèles et imprimons des mètres de feuilles de papier; des matériaux coûteux qui, dans la plupart des cas, finiront rapidement à la poubelle. Dans la vie professionnelle, le traceur continue de travailler plus dur et les dépenses matérielles de nos anciens modèles sont amplifiées jusqu’à l’échelle 1: 1.
Pourquoi ne pas toujours concevoir à partir des dimensions standard des matériaux pour éviter le gaspillage? Pourquoi ne pas analyser s’il est vraiment nécessaire que notre projet d’habitation ait 600 m2, ou si ce cantilever ou ce mur courbe qui nous oblige à dépenser des ressources de plus en plus rares se justifie?
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Pourquoi ne pas toujours concevoir à partir des dimensions standard des matériaux pour éviter le gaspillage? Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 07: CONCEPTION DES MOTIFS AUX DÉTAILS
« En prenant du recul, nous pouvons voir des modèles dans la nature et dans la société. Ceux-ci peuvent être les pierres angulaires de nos créations, y compris les détails au fur et à mesure. » – David Holmgren
Pour expliquer ce principe, Holmgren donne l’exemple des toiles d’araignées: chacune est unique, cependant, le motif géométrique des anneaux en spirale est universel.
Plusieurs fois, on nous dit à l’école d’architecture qu’il n’est pas nécessaire de «réinventer la roue» chaque fois que nous entreprenons un nouveau projet . De nombreuses opérations, dimensions et configurations spatiales sont évidentes et efficaces pour l’architecture car elles découlent directement de l’expérience et du comportement antérieurs de l’être humain .
Si nous suivons ces modèles éprouvés par le bon sens, nous travaillerons sur des fondations solides et incontestables, que nous pourrons ensuite apporter à leur plein potentiel grâce au développement. De cette façon, le détail – dans le cadre de notre contribution particulière – s’éloigne du simple ornement pour émerger comme une valeur ajoutée , qui le soutient et donne identité et spécificité à la réponse apportée. Enregistrez cette image dans vos favoris
De nombreuses opérations, dimensions et configurations spatiales sont évidentes et efficaces pour l’architecture car elles découlent directement de l’expérience et du comportement antérieurs de l’être humain. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 08: INTÉGRER PLUS QUE SEGREGATE
« En mettant les bons éléments au bon endroit, les relations se développent entre eux et se soutiennent mutuellement. » – David Holmgren
Ce principe est clair et nous l’avons tous vérifié durant la vie universitaire ou professionnelle: « beaucoup de mains font le travail le plus léger ». Il est probable qu’un travail conjoint nous permettra d’atteindre un résultat plus adéquat, car nous serons en mesure de partager des stratégies, de comparer des points de vue et de remettre en question nos idées mutuellement , en plus d’accélérer un processus qui pourrait être individuellement plus long, moins efficace et même mal. Mais on peut aller plus loin:
Nos conceptions peuvent être vraiment intégrées si tous les éléments qui les composent sont disposés et fonctionnent correctement ensemble, formant un total cohérent, dans lequel rien ne manque ou rien n’est laissé .
De plus, la possibilité de définir la façon dont l’espace conçu sera habité à l’avenir est entre nos mains, et en ce sens, il est possible d’ incorporer des opérations subtiles qui stimulent l’intégration de ses utilisateurs , générant des espaces de contact et de rencontre qui s’équilibrent. avec ces espaces privés indispensables à leur développement individuel. Enregistrez cette image dans vos favoris
Travailler ensemble nous permettra d’atteindre un résultat plus approprié, car nous pourrons partager des stratégies, comparer des points de vue et questionner nos idées mutuellement. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 09: UTILISER DES SOLUTIONS PETITES ET LENTES
«Les petits systèmes lents sont plus faciles à entretenir que les grands systèmes, ce qui permet une meilleure utilisation des ressources locales et des résultats plus durables.» – David Holmgren
À ce stade, le concept de maintenance ou de maintenance apparaît; un sujet beaucoup plus pertinent qu’il n’y paraît car plus un bâtiment est grand, plus il faut de ressources et de processus pour le préserver et éviter sa détérioration .
Si, en tant qu’architectes, nous sommes vraiment engagés dans un projet et son avenir, nous essaierons de minimiser sa conception et de faciliter ses besoins d’entretien, de ses matériaux à la taille et la configuration de ses espaces.
Un bon bâtiment doit nécessiter une attention minimale de ses utilisateurs , leur permettant de mener à bien leurs activités sans se soucier constamment d’un système qui ne fonctionne pas correctement ou de matériaux qui présentent une usure excessive.
En revanche, un projet limité et adapté aux besoins réels du client est plus efficace dans sa construction , car il utilise moins de mains pour se lever et moins de ressources pour le transfert et la manutention des matériaux. Dans le même temps, il est plus facile à conditionner pour obtenir un confort thermique , facilitant le chauffage et le refroidissement de vos pièces, et même simplifiant d’autres problèmes quotidiens tels que le nettoyage. Enregistrez cette image dans vos favoris
Plus un bâtiment est grand, plus il faut de ressources et de processus pour le préserver et empêcher sa détérioration. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 10: UTILISATION ET DIVERSITÉ DE VALEUR
« La diversité réduit la vulnérabilité à une variété de menaces et tire parti de la nature unique de l’environnement dans lequel elle vit. » – David Holmgren
Dans ce dixième principe, Holmgren nous dit « ne mettez pas tous vos œufs dans le même panier », garantissant que la diversité nous offre une « assurance » contre les variations de notre environnement.
Si l’on constate que dans une ville il existe différents types de bâtiments – de tailles, configurations et orientations différentes -, c’est parce que chacun d’eux a été pensé pour répondre à des conditions spécifiques, correspondant à chaque terrain et utilisateur en particulier . Si au lieu de cela, nous trouvons des quartiers dans lesquels absolument toutes les maisons sont identiques, quelque chose ne va pas. Pourquoi une maison située sur une rue principale devrait-elle être la même que celle située sur une rue intérieure avec peu de mouvement? Pourquoi une maison qui reçoit beaucoup de lumière du nord devrait-elle être la même que celle qui est orientée plus au sud? Cela n’a aucun sens.
La diversité reflète une certaine spécificité dans les réponses apportées par chaque architecte , permettant à chaque projet d’être conçu en fonction des circonstances qui l’entourent.
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Si dans une ville on peut remarquer qu’il existe différents types de bâtiments, c’est parce que chacun d’entre eux a été conçu pour répondre à des conditions spécifiques, correspondant à chaque terrain et utilisateur en particulier. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 11: UTILISER LES BORDS ET VALORISER LA MARGINALE
« L’espace est l’endroit où se produisent les événements les plus intéressants. En général, ce sont les éléments les plus précieux, les plus divers et les plus productifs du système. » – David Holmgren
« Ne pensez pas que vous êtes sur la bonne voie simplement parce que tout le monde l’utilise. » Holmgren est clair en nous disant que le besoin le plus populaire ne coïncide pas toujours avec la meilleure approche.
Ce principe nous dit de profiter et de valoriser toutes ces opportunités qui à première vue ne semblent pas pertinentes, et d’ analyser la commission reçue avec un regard ouvert, ce qui nous permet de voir au-delà de l’évidence .
Si notre projet semble aller dans la mauvaise direction, il peut être bon de le tourner complètement. Si nous ne pouvons pas trouver de variables pour nous aider à concevoir sur le site lui-même, il pourrait être bon de regarder au-delà des murs qui l’entourent.
Aux abords, juste parce qu’ils sont en dehors de la « norme » (ou d’un point de vue centralisé), une série de situations spontanées commencent à se produire qui, dans la plupart des cas, ont raison de se produire naturellement, sans pression ni stéréotypes. De la même manière, nos conceptions doivent être considérées; éviter les idées préconçues et les modes qui nous limitent à travailler dans certaines limites , car nous pouvons facilement ignorer le «point clé» du projet. Enregistrez cette image dans vos favoris
Sur les bords, une série de situations spontanées se produisent qui, dans la plupart des cas, peuvent se produire naturellement, sans pression ni stéréotypes. Image courtoisie de José Tomás Franco
Principe 12: UTILISATION ET RÉPONSE CRÉATIVE AU CHANGEMENT
« Nous pouvons avoir un impact positif sur les changements inévitables en regardant attentivement, puis en intervenant au bon moment. » – David Holmgren
Enfin, Holmgren assure que « la vision n’est pas de voir les choses telles qu’elles sont, mais telles qu’elles seront » et que la compréhension du changement va bien au-delà d’une projection linéaire.
Bien que ce soit une tâche difficile, en tant qu’architectes, nous devons être capables d’imaginer l’avenir . Les bâtiments que nous construisons aujourd’hui façonneront le «contexte» d’un autre architecte au cours des décennies suivantes et d’une certaine manière, nous déterminons ce qui sera fait ou ne sera pas fait plus tard.
Notre responsabilité est de bien «prendre de l’avance» sur ce qui est à venir et la meilleure façon de le faire est de nous assurer que chacun de nos projets nous aide à nous guider – en tant qu’êtres humains – vers le meilleur avenir possible.
Peut-être que si nous suivons ces 12 principes, nous sommes plus près de laisser un bon héritage. C’est juste du simple bon sens.
Les éco-intellectuels : 100 penseurs pour comprendre l’écologie• Crédits : the_burtons - Getty
Comment penser l’écologie aujourd’hui ? Quels sont les intellectuels qui comptent dans les différentes sphères de réflexion de l’environnement, du climat et de la biodiversité ? Quelles nouvelles idées émergent, au-delà des chapelles, depuis l’ultra-gauche écolo jusqu’à la droite environnementaliste, en passant par les artistes et les théologiens ? Quels livres faudrait-il lire ? L’équipe de « Soft Power » sur France Culture propose sa petite bibliothèque idéale de l’écologie.
Cette cartographie de la vie des idées en matière d’écologie, de climat et de biodiversité a été préparée comme le prolongement d’une émission du même titre pour « Soft Power » sur France Culture (podcast ici). Si notre liste se veut plurielle et pluraliste, elle ne vise évidemment pas l’exhaustivité. Nous en connaissons les limites (trop française, trop « progressiste », trop masculine) malgré nos efforts. Nous avons également privilégié les penseurs qui s’inscrivent dans les thématiques de l’émission (numérique, culture, influence, soft power). Vous pouvez nous contacter pour nous proposer des compléments. Nous mettrons à jour régulièrement cette « bibliothèque idéale de l’écologie ».
Le Mahatma Gandhi vers 1935 : l'inspirateur d'une forme d'écologie.• Crédits : Hulton Archive - Getty
Les précurseurs
Lucrèce. Le poète et penseur latin défend l’idée que penser la nature implique de la dé-mythologiser. Il faut débarrasser la pensée de la nature de tout ce que l’anthropomorphisme a produit comme superstitions et croyances et qui empêchent de véritablement la penser. Dans ce chef d’œuvre qu’est De rerum natura (De la nature), Lucrèce montre que la nature, dans l’imaginaire de l’époque, revêt un caractère sacré constitutif de toute pensée sur la nature. Selon lui, la nature est dynamisme, production d’ordres où les hommes ont une place. Il développe un système dans lequel la nature, en tant qu’elle est imparfaite, ne peut provenir d’une divinité. Il s’agit dès lors de la désacraliser pour en comprendre le principe et le sens. [NMM]
Jean-Jacques Rousseau (1712-1778). Le philosophe et écrivain de Genève est l’un des premiers « penseurs » de la nature et un père de l’écologie moderne. Sur le plan théorique (Le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, dit « Second Discours ») comme dans le registre littéraire (Les Rêveries du promeneur solitaire, Les Confessions), il a défendu une relation harmonieuse entre l’humanité et la nature. Dans le « Second discours », Rousseau fait le procès d’une société qui a perverti l’homme, lequel aurait été « bon » dans « l’état de nature », avant la propriété privée et le marché. Toute son œuvre (y compris Émile et La Nouvelle Héloïse) place la nature au cœur des modalités humaines, jusque dans l’éducation ou les relations amoureuses. L’animal est lui-même pensé comme « machine ingénieuse ». Sur la tombe du philosophe est gravé : « Ici repose l’homme de la nature et de la vérité ». (Voir : Victor Goldschmidt, Anthropologie et politique ; Tzvetan Todorov, Frêle bonheur, Essai sur Rousseau ; et Philippe Roch, Dialogue avec Jean-Jacques Rousseau sur la nature). [FM]
Ralph Waldo Emerson (1803-1882). Poète et philosophe américain, Emerson se distingue du romantisme européen (Schelling, Fichte, Cousin, etc.), pour lequel Dieu est présent dans la nature à l’état de trace, de ruines. Dès 1986 dans Nature, Emerson développe un romantisme panthéiste : Dieu est présent activement au sein de la nature, pensée comme l’expression de sa création, le lieu privilégié pour comprendre ce qu’elle est et la place que l’homme y tient. Philosophe principal du « transcendantalisme », Emerson cherche à entrer en communion avec la nature et le grand tout qu’elle compose, dans une mystique dépouillée et puritaine, notamment dans ses Poems (1847). (Écouter ce podcast) [EM]
Henry David Thoreau (1817-1862). Poète émerveillé par la nature, naturaliste l’observant minutieusement, il façonne l’idée d’une « simplicité volontaire » contre les dévoiements de la société marchande, annonçant la pensée de la décroissance : « Un homme est riche des choses dont il peut se passer ». Walden ou la Vie dans les bois (1854), le célèbre récit de sa retraite dans une cabane au bord d’un lac, à l’écart de la société, a eu une grande influence non seulement sur la philosophie environnementale, mais aussi sur la politique de préservation des parcs naturels aux États-Unis dès la seconde moitié du XIXe siècle. (Écouter ce podcast) [EM]
Rosa Luxemburg (1871-1919). Dans l’une de ses lettres de prison du 2 mai 1917, la militante incarcérée fait part à Sophie Liebknecht de ses lectures, « des ouvrages de sciences naturelles : botanique et zoologie », et de son émotion face à la disparition des oiseaux chanteurs en Allemagne : « Je n’ai pas tellement pensé au chant des oiseaux et à ce qu’il représente pour les hommes, mais je n’ai pu retenir mes larmes à l’idée d’une disparition silencieuse, irrémédiable de ces petites créatures sans défense. » Mettant en parallèle cet évanouissement animal et la lente et silencieuse mort des Peaux-Rouges en Amérique du Nord, chassés de leur territoire, Rosa Luxembourg invite, en quelques lignes frappantes, à prendre en considération tous les dépeuplements inaudibles, humains ou animaux, qui ont cours à la surface de la Terre. [EM]
Gandhi (1869-1948). Dès ses années sud-africaines, Gandhi affirme son souci de la nature et de l’animal : il est végétarien (et le plus souvent vegan), multiplie les jeûnes, s’habille simplement d’une dhoti et construit son existence sur une grande austérité. En union avec la nature, il s’attache à un mode de vie brahmacharya, où cet ascétisme général se double de la chasteté. Dans ses livres et son autobiographie, il s’est voulu un militant végétarien (pour des raisons spirituelles, mais également politiques et économiques) et a critiqué les sociétés occidentales ou rejeté les théories du développement. Mais au-delà de ses idées directement « écologiques », l’influence de Gandhi sur la mobilisation environnementale se fait également à travers les concepts qu’il a inventés : satyāgraha (résistance par la désobéissance civile) et ahimsā (la non-violence). Pour beaucoup d’activistes pacifiques qui se soucient aujourd’hui de la planète, du climat ou de l’animal, son nom résonne encore, plus de soixante-dix ans après sa mort. (Voir : Joseph Lelyveld, Great Soul). [FM]
Dans "Les Raisins de la colère", John Steinbeck annonce les migrations climatiques.• Crédits : Bettmann - Getty
Les écrivains, les poètes
Rimbaud (1854-1891). Dans une œuvre séminale, l’un des plus grands poètes français – sinon le plus grand – a publié trois poèmes majeurs et prémonitoires qu’on peut qualifier aujourd’hui de « poèmes verts ». Dans « Soleil et chair », il propose : « Répondre à son appel la Nature vivante » ; et davantage qu’au catholicisme, c’est à la « Divine mère » qu’il croit, cette nature qui est pour lui « la première beauté » – et qu’il ne faut pas « insult[er] ». Dans le poème communard « Bannières de mai », Rimbaud s’adresse à « ô Nature », et affirme : « À toi, Nature, je me rends ». Dans « Aube », poème clé des Illuminations, il rêve à une « aube » inspiratrice. Ce thème majeur de l’ « aube » traverse d’ailleurs son œuvre (« Le Bateau ivre », « Chant de guerre parisien », « Bonne pensée du matin », « Ornières », « Promontoire », « Bottom »). Dans « Ce qu’on dit au poète à propos de fleurs », il aspire à une nouvelle poésie qui, en ce « Siècle d’enfer », saura inventer la couleur d’ « étranges fleurs ». (Voir André Guyaux, éd., Œuvres complètes ; Yves Bonnefoy, Notre besoin de Rimbaud ; René Char, préface, Poésies). [FM]
John Steinbeck (1902-1968). Avec Les Raisins de la colère (1939), son chef d’œuvre, Steinbeck annonce les migrations climatiques. Son portrait durable des « Okies » qui fuient la sécheresse pour finir prisonniers… des inondations est l’un des plus grands romans américains de tous les temps. Le prix Nobel de littérature y préfigure les crises sociales et écologiques qui, ici, se combinent dans la grande migration, sur la Route 66, de l’après Dépression. [FM]
James Graham Ballard (1930-2009). Ses œuvres de science-fiction invitent le lecteur à sillonner les territoires ravagés d’époques post-apocalyptiques dans Le Monde englouti (1962) et dans Sécheresse (1965), ou à explorer un monde où l’homme s’évanouit lentement, pris au piège d’une nature vitrifiée dans La Forêt de cristal (1967). La fiction comme expérience littéraire des formes que prendrait l’extinction de notre espèce. [EM]
Ursula K. Le Guin (1929-2018). Romancière et poétesse, sa littérature de science-fiction et de fantasy déploie les possibles de mondes imaginaires et extraterrestres : des sociétés interspécifiques, anarchistes ou androgynes, des récits de destruction, de naissance ou de survie, des « utopies ambiguës »… Dans Les Dépossédés (1974), interrogeant les rapports entre contrainte écologique et démocratie, elle met en scène deux planètes opposées, mais liberticides chacune à leur manière : Uras, où le règne de l’abondance peut avoir cours au prix d’un rapport prédateur et inégalitaire aux ressources naturelles, et Anarres, dont le communisme libertaire se fait sur la base d’une rareté des ressources. Une auteure majeure de science-fiction (même si elle n’aimait pas cette étiquette !) [EM]
Francis Ponge (1899-1988). Poète du relais entre la parole et le réel, d’un véritable « Parti pris des choses » (1942), son œuvre est peuplée d’animaux, d’objets, d’éléments naturels : la pluie, les mûres, l’huître, le feu, la végétation, le galet, les hirondelles… C’est tout un monde muet qu’il cherche à dire, dont il tente de rendre les surfaces, les textures, les singularités. Il dresse, avec les moyens de la parole, un savoir poétique des choses, transcrit leur univers propre, et leur réclame même des droits (« En revenir toujours à l’objet lui-même », écrit-il dans « Berges de la Loire », « reconnaître le plus grand droit de l’objet, son droit imprescriptible […], il n’a aucun devoir vis-à-vis de moi, c’est moi qui ai tous les devoirs à son égard »). [EM]
Jonathan Safran Foer (1977). Le romancier américain réputé a publié en 2009 un essai qui a fait date : Faut-il manger les animaux ? Dans ce livre efficace, l’écrivain s’engage résolument en faveur de la cause animale et pour le mode alimentaire végétarien. Son propre choix alimentaire personnel est original (il est vegan au petit déjeuner et au déjeuner – sans aucun produit d’origine animale – mais végétarien au dîner – où il consomme des œufs et des produits laitiers mais pas de viande). Dans l’ouvrage, il milite également contre l’élevage industriel et, preuves à l’appui, contre la souffrance animale. L’impact de cet ouvrage a été considérable, notamment parce qu’il est signé par l’une des figures clés de la nouvelle littérature américaine. Plus récemment, Jonathan Safran Foer revient une nouvelle fois sur le rôle de l’élevage intensif dans la crise climatique (L’avenir de la planète commence dans notre assiette). Il se propose également dans un entretien au Monde de « moins utiliser l’avion, vivre sans voiture, avoir moins d’enfants et réduire notre consommation de produits d’origine animale ». [FM]
Premiers philosophes ayant pensé l’écologie au XXème siècle
Hans Jonas (1903-1993). Dans Le Principe de responsabilité (1979), il tente de construire une « éthique pour la civilisation technologique », repensant les catégories morales du bien, du devoir, de l’engagement, à partir d’un « principe de responsabilité » qui lie les générations présentes à celles futures, rendues vulnérables par une science aux pouvoirs désormais illimités. Cette « éthique de l’incertitude » nourrit le concept de « principe de précaution ». Ainsi, il donne une légitimité philosophique à l’exploration hypothétique du futur, au sens où il ancre sa réflexion sur la prévision de l’avenir, et non sur l’analyse du passé, comme la plupart des philosophes marxistes ou libéraux. Le souci des autres au nom du lendemain. (Voir aussi : Eva Sas, Philosophie de l'écologie politique et ce podcast). [EM]
Günther Anders (1902-1992). Philosophe allemand (notamment l’un des penseurs de la bombe nucléaire), sa critique de la technologie s’axe autour de l’hypothèse que l’humanité serait entrée, après 1945 et les bombardements atomiques au Japon, dans une nouvelle ère. Un « temps de la fin » où elle est chaque jour en mesure d’entraîner sa propre disparition par des moyens technologiques qui la dépasse, dans l’attente interminable d’une « apocalypse sans royaume », une destruction sans salut… (Voir notamment : La Menace nucléaire : Considérations radicales sur l'âge atomique). [EM]
Felix Guattari (1930-1992). Si l’on se souvient de Félix Guattari d’abord pour sa collaboration avec Gilles Deleuze, il faut rappeler ses textes tardifs, portant sur la crise écologique, où il développait l’idée d’un paradigme écologique élargi et complexe. Pour lui, on ne peut pas penser l’écologie sans faire une place à la soutenabilité et le soin des milieux sociaux et mentaux : l’écologie se doit donc d’être au moins triple. Voir surtout Les Trois écologies (paru en 1989) et son plaidoyer pour des réflexions et des pratiques « écosophiques ». [JR]
Jürgen Habermas (1929). Le philosophe allemand, héritier de l’École de Francfort, est aujourd’hui déterminant dans la réflexion écologique car il réfléchit à son articulation avec la démocratie. Quand de nombreux penseurs « verts » échafaudent des scénarios inspirés par une pensée libertaire, sans État ni politique, difficiles à mettre en œuvre dans un cadre démocratique, Habermas se propose notamment de refonder la démocratie à l’âge écologique. Autour de ses travaux sur la « démocratie participative » (ou délibérative) et le principe de publicité des débats (éthique de la discussion), ce marxiste sincère qui – comme Claude Lefort et Cornelius Castoriadis avec « Socialisme ou Barbarie » –, fut abasourdi par le totalitarisme soviétique, tente de réconcilier écologie et démocratie. Ce faisant, Habermas combat les risques autoritaires des pensées écologiques et refonde l’ « écologie politique » sur des bases pluralistes en dépit de sa fragmentation idéologique. Loin du courant de l’ « écologie autoritaire », ou même de l’ « écologie profonde », sa pensée contribue à bâtir une « écologie démocratique ». (Voir notamment La technique et la science comme idéologie, Après Marx, Le discours philosophique de la modernité, De l’éthique de la discussion, L’avenir de la nature humaine). [FM]
Ulrich Beck (1944-2015). Le sociologue allemand s’est durablement intéressé aux problèmes écologiques, aux conséquences de la modernisation et à la question du risque. Dans son livre majeur, La Société du risque (1986) il remet en cause notre évaluation (ou notre hiérarchisation) du risque qui peut contribuer à privilégier des solutions immédiates sur des solutions durables. Ce faisant, il réfléchit à une meilleure répartition des risques à l’âge de la globalisation et de la « seconde modernité ». [FM]
Jacques Derrida (1930-2004). Dans L’animal que donc je suis (2002), Jacques Derrida observe l’oubli de l’animal dans la philosophie moderne occidentale « logocentrée » : il est réduit à une pure altérité, un simple mot, un « animot », désignant ce que l’humain n’est pas et ne veut pas être, justifiant par répercussion son exploitation. Pourtant, la frontière serait plus poreuse qu’il n’y paraît, notamment sur la question du langage, reliant possiblement tous les êtres vivants entre eux. [EM]
Arne Næss (1912-2009). La pensée du philosophe norvégien a accompagné la mobilisation écologique émergeante vers une radicalisation du paradigme environnemental, de ses amorces « superficielles » vers ses implications « profondes ». Si l’écologie de surface se préoccupe exclusivement du traitement de tels déchets ou de tel approvisionnement énergétique, la « deep ecology » (ou « écologie profonde ») nous pousse à déplacer le regard humain à une échelle plus vaste, au niveau de l’importance intrinsèque de chaque manifestation du vivant avec laquelle nous sommes toujours déjà en relation. Il faut que le discours analytique autour des milieux (éco-logie) soit incarné par la sagesse pratique de formes de vie respectueuses et soutenables (éco-sophie). À travers la notion de flourishing (« épanouissement »), il insiste sur le changement de regard porté sur la nature : une relation harmonieuse comme source de valeur. (Voir notamment : Une écosophie pour la vie et Écologie, communauté et style de vie). [JR, NMM]
Jacques Ellul (1912-1994). Critique radical de l’idéologie techniciste, qui asservit l’homme et détruit la nature, il a prôné, avec Bernard Charbonneau, une écologie qui déconstruit le mythe du progrès et de la technique, replaçant l’homme dans son environnement naturel. (Voir Nous sommes des révolutionnaires malgré nous). [EM]
Ivan Illich (1926-2002). Prêtre autrichien-américain spécialiste de l’éducation (concept de la « société apprenante), Illich a publié de nombreux ouvrages notamment sur l’énergie, l’eau, l’automobile et a contribuer à imaginer la ville écologique future (sans voiture). Anarchiste, penseur de l’écologie radicale, et critique de la société industrielle (illusoire et aliénante), il a également contribué à la réappropriation chrétienne de l’écologie. Avec le concept de « contre-productivité », il a pointé du doigt les dévoiements d’un productivisme retourné comme un gant par ses propres excès. Contre la vitesse, le développement exponentiel des activités humaines, le culte de la croissance, il dessine une piste : une société « conviviale », c’est-à-dire « une telle société dans laquelle les technologies modernes servent des individus politiquement interdépendants, et non des gestionnaires » (Voir : La Convivialité ; et Thierry Paquot, Introduction à Ivan Illich). [EM]
Isabelle Stengers, philosophe belge et écologiste• Crédits : Bruno Arnold / Belga - AFP
Philosophes contemporains
Michel Serres (1930-2019). Récemment disparu, Michel Serres a pensé, notamment dans Le Contrat naturel (1990), l’écologie à partir d’une question juridique : la nature peut-elle être sujet de droit, et non plus seulement un objet ? Serres tente alors l’élaboration d’un droit nouveau, un contrat social désormais étendu au monde, aux choses, au vivant, dans une vaste symbiose. Reformulant le « Et pourtant, elle se meut ! » apocryphe de Galilée en « Et pourtant, elle s’émeut », il propose de reconsidérer la planète, non seulement en mouvement, mais aussi vivante, remuante, émotive quant à ce que nous lui faisons. Une deuxième révolution galiléenne. (Ecouter ce podcast). [EM]
Donna Haraway (1944). Formée comme biologiste, Donna Haraway se dirige vers l’histoire de la biologie, rendant compte du rôle que joue cette science dans les sociétés humaines, mais aussi de sa dimension métaphorique (How like a Leaf, 1999). Plus récemment, elle propose dans Staying with the Trouble : Making Kin in the Chthulucene (2016) de nouvelles cohabitations à l'heure des violentes mutations écologiques. Elle invite à « habiter le trouble », en faisant se rencontrer les figures majeures de son travail : les cyborgs, les « espèces compagnes » et les créatures du « Chthulucène », concept qui entend englober toutes les entités de la biodiversité dans une cohabitation renouvelée autour d’un récit commun multispécifique et enchevêtré. [EM]
Isabelle Stengers (1949). Elle a introduit en philosophie le concept « Gaïa » développé par James Lovelock et Lynn Margulis, notamment dans Au temps des catastrophes. Résister à la barbarie qui vient (2009), où elle pense « l’intrusion Gaïa », soit le surgissement brutal de cet « agencement chatouilleux de forces indifférentes à nos raisons et à nos projets » qui compose le monde dans lequel nous vivons, et auquel elle appelle à faire à nouveau attention. [EM]
Bruno Latour (1947). Le travail socio-anthropologique de Bruno Latour sur les institutions sociales de notre modernité occidentale (l’univers scientifique, par exemple) a annoncé et fondé ses travaux plus récents et éclectiques autour des questions écologiques. À la croisée de la théorie politique et de la spéculation ethnologique, dans ses livres les plus récents comme Face à Gaïa (2015) ou Où atterrir ? (2018), il se propose de reconnaître et d’assumer les liens inexorables qui nous attachent aux réseaux de formes de vie terrestres. L’humain est impliqué dans les environnements qu’il habite : en diplomate, il doit négocier politiquement avec l’ensemble de leurs composantes (y compris non humaines) une co-existence désirable. [JR]
Dominique Bourg (1953). Le philosophe d'origine jurassienne s'est engagé entièrement dans une réflexion relative à la protection de l'environnement face à l'urgence climatique. Il a ainsi publié de nombreux ouvrages et dirigé plusieurs collections relatives aux questions environnementales. Ses travaux portent sur l'éthique du développement durable, où il dénonce en particulier les dérives du marché et de notre croyance aveugle dans le progrès. Il s'est engagé en tête de la liste Urgence écologie aux élections européennes de 2019. Membre de la commission Coppens, à l'origine de la charte française de l'environnement, il a pris la tête de la liste "Urgence écologie" lors des élections européennes de 2019. Il est notamment l'auteur d'un Dictionnaire de la pensée écologique (2015) ou encore de l'ouvrage Du risque à la menace, Penser la catastrophe (2013). [NMM]
Timothy Morton (1968). Philosophe anglais, entré récemment dans le débat intellectuel français avec la publication de quelques ouvrages fondamentaux (Hyper-objets et La pensée écologique en 2018) et avec la une de Philo Magazine, « De la crise écologique qui nous menace », il tente de tirer les conclusions théoriques les plus radicales et cohérentes en jonglant entre la tradition conceptuelle et la culture pop. Il est notamment l’inventeur du concept d’« hyper-objet », décrivant des entités objectives dévoilées par la perspective environnementale qui échappent à la prise temporelle, spatiale et décisionnelle des subjectivités humaines (le nucléaire, les gaz à effets de serre…). [JR]
Vinciane Despret (1959). Philosophe des sciences, elle mène une réflexion sur les façons dont nous nous rapportons aux animaux, sur les dispositifs scientifiques qui nous mettent en contact avec eux, dans le sillage des travaux de Bruno Latour et d’Isabelle Stengers. Montrant comment les bêtes sont considérées de telle sorte qu’elles répondent aux questions que les humains se posent sur eux-mêmes, elle complexifie aussitôt cette proposition en mettant en évidence à quel point les animaux ne sont pas des objets d’observation passifs : ils ont le souci de l’image qu’ils donnent à l’éthologue, à l’humain qui les regarde… (Voir notamment : Penser comme un rat et Que diraient les animaux, si… on leur posait les bonnes questions ?, Habiter en oiseau). [EM]
Val Plumwood (1939-2008). Philosophe australienne qui a développé une critique écologique de la raison moderne, en contestant le dualisme raison/nature, à l’origine de la crise environnementale. Elle interroge ainsi les oppositions entre l’humain et la nature, le corps et l’esprit, l’intellect et les affects, dans une perspective éco-féministe, établissant un lien entre le projet de domination de la nature et les rapports de domination entre humains, notamment entre hommes et femmes, ces dernières étant rabattues du côté d’une nature exploitable, émotive, inférieure à la raison. (Voir notamment : Feminism and the Mastery of Nature, et Environmental Culture. The Ecological Crisis of Reason). [EM]
René Dumont (au centre) lors d'une manifestation anti-nucléaire à Paris, en 1986, après l'accident de Tchernobyl.• Crédits : Bernard Bisson / Sygma - Getty
Edgard Morin (1921). L'intellectuel engagé possède une oeuvre à la fois prolifique et "complexe", embrassant un champ très large de thèmes de réflexion. La méthode qu'il déploie dans ses recherches, au moyen de ce qu'il nomme la "reliance" et fondée sur la transdisciplinarité, ne peut alors se soustraire à une réflexion sur la nature et sur l'environnement. En particulier, son analyse des effets de la mondialisation à partir de la triade non gouvernée de la science, de la technique et de l'économie, appelle à une nouvelle position à tenir concernant l'environnement. Dans son oeuvre majeure La méthode, les deux premiers volumes abordent dans leur complexité les systèmes de la Nature et de la Vie, interrogeant les concepts de la physique classique et de la biologie, comme soutenant un rapport à la nature. Son récent soutien au chef Raoni pour la préservation des droits des peuples indigènes et de la protection de l'Amazonie témoigne de son engagement, toujours indissociable de sa pensée. Voir aussi : Terre-Patrie (1993) et l'An I de l'ère écologique (2007), co-écrit avec Nicolas Hulot. [NMM]
Les écologistes
André Gorz (1923-2007). Il est l’un des penseurs qui a le plus contribué au développement de l’écologie politique en France et au-delà. Comme il le disait lui-même, c’est par la critique du modèle de consommation opulent qui caractérise les sociétés contemporaines qu’il est devenu écologiste avant la lettre. Son ouvrage pionnier sur ce thème date de 1975 et s’intitule Écologie et Politique. Mais aujourd’hui, à la différence d’une écologie purement scientifique qui vise à déterminer des limites écologiquement supportables pour le développement de l’industrialisme, Gorz privilégie une « défense de la nature » conçue avant tout comme la « défense du monde vécu », qui préserve l’autonomie des individus et du politique. Le mouvement écologiste s’est d’ailleurs construit initialement sur la défense du milieu de vie en tant que déterminant de la qualité de la vie. On peut retrouver l’ensemble du cheminement de Gorz en lisant son recueil posthume Ecologica paru en 2008. [CF]
René Dumont (1904-2001). Ingénieur agronome, il est le premier candidat écologiste à se présenter à l’élection présidentielle de 1974. Dans son autobiographie intitulée Agronome de la faim (1974), il évoque sa prise de conscience des enjeux écologiques, remettant en cause une conception de l’agronomie tournée vers le rendement et la maîtrise de la nature. Son combat pacifiste et anticolonialiste contre les inégalités dans le monde, couplé à son souci de transformer les méthodes agricoles, le mènent à défendre un « éco-socialisme », appelant à une civilisation « de l’arbre et du jardin », dans laquelle la paysannerie jouerait un rôle fondamental. (Ecouter le podcast). [EM]
Patrick Viveret (1948). De l’autogestion (PSU, Seconde gauche) aux mouvements écologiques français actuels, le parcours de Patrick Viveret résume bien la prise de conscience écologique de sa famille politique, à savoir la gauche démocratique. Précocement, il s’est intéressé à l’écologie (à partir des travaux d’Ivan Illich, Edgar Morin ou André Gorz, ou dans une optique altermondialiste), et a permis le renouvèlement de la pensée de gauche sur cette thématique. Ses thèmes de travail sont nombreux (Rapport « Reconsidérer la Richesse » sous le gouvernement Jospin, fondateur du Mouvement Sol des monnaies citoyennes, textes sur la refonte du PIB, délibération, démocratie et environnement…) : ils font de Patrick Viveret l’un des penseurs majeurs de la mouvance écologiste française. (Voir : Reconsidérerlarichesse, AttentionIllich, Unealternativedesociété: l’écosociétalisme ; voir aussi Pourunenouvelleculturepolitique [avec Pierre Rosanvallon] ainsi que son dernier livre : LaCause humaine, Du bon usage de la fin d’unmonde). [FM]
David Abram (1996). Notamment auteur de Comment la terre s’est tue. Pour une écologie des sens (2013), Abram a voulu appréhender la question écologique à partir d’une réflexion sur nos sensibilités et leur configuration culturelle. La crise environnementale à laquelle notre civilisation est confrontée prendrait racine dans notre incapacité à prêter attention aux univers terrestres que nous habitons. Ailleurs dans le monde, d’autres communautés humaines (minoritaires, certes) nous montrent les possibilités oubliées d’une écoute et d’un dialogue avec la Terre. [JR]
Aldo Leopold (1887-1948). Écologue, forestier, professeur, il participe activement à la défense du premier espace naturel officialisé aux États-Unis. Il critique le principe de propriété des terres qui est selon lui incompatible avec une coexistence harmonieuse avec la nature. Il est l’auteur de l’Almanach d’un comté des sables, ouvrage à succès qui permît une prise de conscience au grand public de la nécessité de protéger l’environnement. Leopold fait partie du courant dit préservationniste de l’environnement, qui affirme le besoin de préserver non seulement une nature domestiquée, mais encore une part de sauvage. Son éthique de l’environnement repose sur le principe suivant : « une chose est juste lorsqu’elle tend à préserver l’intégrité, la stabilité et la beauté de la communauté biotique » (chapitre « Éthique de l’environnement »). Il fonde ainsi une véritable land ethic, une éthique de la terre. [NMM]
Les économistes
Serge Latouche (1940). Économiste, théoricien majeur de la « décroissance », de Faut-il refuser le développement ? (1986) au Temps de la décroissance (2012), il élabore une critique de l’« économicisation » des sociétés, où marchandisation et consommation de masse s’étendent de façon démesurée et aliénante, où croissance et innovation sont devenues les seuls horizons. Il prône contre cela une « décolonisation des imaginaires » de la croissance, afin de changer les mentalités et les habitudes, et forger une société libérée de l’économisme, tournée vers la justice sociale et environnementale. [EM]
René Passet (1926). Son analyse se fonde sur une critique de notre paradigme économique qui s’est substitué au point de vue englobant sur la nature. Il faut au contraire, selon Passet, repenser l’englobant écologique comme étant premier, selon ces trois « sphères d’emboîtement » : le vivant (la nature), l’humain puis l’économique. Dans son ouvrage L’économique et le vivant (1979), il décrit cette « révolution mentale » qu’il faut accomplir comme la seconde plus importante de l’histoire de l’espèce humaine, après la sédentarisation durant le néolithique. Il écrit ainsi : « les hommes sont conduits à repenser leurs comportements dans le respect des lois qui gouvernent le monde : accéder à la conscience cosmique ou disparaître, tel est le défi redoutable et magnifique auquel ils se trouvent confrontés ». (Voir également : L’Illusion néo-libérale, Les Grandes Représentations du monde et de l’économie à travers l’histoire). [NMM]
Michel Aglietta (1938). Il est l'un des fondateurs de l'École de la régulation, qui s’opposent aux économistes néoclassiques/monétaristes. Aglietta fait le lien entre inégalités croissantes et crise environnementale, toutes deux issues d’un capitalisme financiarisé en pleine dérive. Il vient de publier un rapport qu'il a coordonné pour la Caisse des dépôts : « Transformer le régime de croissance ». Avec notamment Jean-Charles Hourcade, il réfléchit également aux mécanismes financiers et bancaires complexes (par exemple la blended finance) qui pourraient permettre de penser la décarbonisation. [EM]
Eloi Laurent (1974). Il est l’un des économistes français (OFCE) à s’être spécialisé sur les dimensions économiques de la transition écologique et, ainsi, aux conditions politiques nécessaires à la réussite de cette transition. Dans plusieurs ouvrages, il a développé l’idée d’une « social-écologie » (La Nouvelle écologie politique, 2008 ; Social-écologie, 2011) ou critiqué l’écolo-scepticisme (Nos mythologies économiques, 2016). Dans son dernier livre (Sortir de la croissance : Mode d'emploi), cet économiste résolument de gauche considère que « la croissance et le PIB ne sont pas, ne sont plus, la solution : ils sont devenus le problème ». Eloi Laurent s’est également intéressé aux nouveaux « indicateurs de bien-être », dans la lignée des travaux de Joseph Stiglitz et d’Amartya Sen, au développement soutenable et, plus récemment, à l’articulation entre crise sociale et crise écologique. [FM]
Les anthropologues
Philippe Descola (1949). Dans le débat écologique contemporain les travaux de l’anthropologue français Philippe Descola, à partir du terrain de l’Amérique du Sud, ont joué un rôle fondamental dans la mise en discussion de l’universalité du partage entre nature et culture. À ce propos, son ouvrage le plus célèbre et fondamental demeure Par-delà nature et culture (2015), où il démontre que l’approche « naturaliste » de la culture moderne occidentale n’est qu’un certain rapport humain au réel. En faisant le tour du monde, nous pouvons rencontrer d’autres communautés structurées par des approches « animistes », « analogistes » ou « totémistes », où l’opposition entre culturel et naturel perd toute sa pertinence. [JR]
Tim Ingold (1948). Le chercheur britannique a d’abord étudié les sciences de la nature pour ensuite se déplacer sur les terrains de l’anthropologie. À partir de cette double filiation, les œuvres pionnières d’Ingold tentent depuis une trentaine d’années de décrire les phénomènes vivants au-delà de la distinction entre le domaine du culturel (humaine) et du biologique (naturel). Ce qui compte est le fait commun d’être en vie (« being alive ») dans un processus de devenir incessant et relationnel à l’intérieur d’un milieu (« from the inside »). [JR]
Eduardo Viveiros De Castro (1951). Anthropologue brésilien proche des communautés autochtones de la forêt brésilienne. Influencé par la pensée deleuzienne, il a contribué à remettre en discussion notre rapport à la soi-disant « Nature » et aux espèces vivantes au nom d’autres manières d’être au monde (à savoir, d’autres ontologies). Son livre le plus connu demeure Metaphysiques Cannibale. [JR]
Anna Tsing (1952). L’anthropologue américaine s’est notamment intéressée, dans Le Champignon de la fin du monde. Sur les possibilités de vie dans les ruines du capitalisme (2015) au champignon matsutake, qui prolifère dans les espaces détruits par les activités humaines : en étudiant sa collecte et sa mise en vente, elle dresse le récit plus vaste des enchevêtrements interspécifiques entre humains et non-humains, tissés par le parcours du champignon, proposant une attention renouvelée aux « histoires divergentes, stratifiées, combinées, qui fabriquent des mondes », d’autres manières de vivre parmi les ruines du saccage écologique. [EM]
Les historiens
William Cronon (1954). Il est l’un des pères fondateurs de « l’histoire environnementale », qui s’attache à faire entrer dans la discipline historienne des éléments naturels : les forêts, les fleuves, les animaux… Dans le sillage des travaux de John Muir et d’Aldo Leopold sur la « wilderness », dans une démarche partant d’en bas et mettant en évidence l’entrelacement des acteurs humains et non-humains, Cronon invite à décentrer le regard anthropocentré que nous posons sur notre propre histoire, pour aller voir ce qui se passe du côté d’un environnement trop longtemps pensé comme coupé des affaires humaines. (Voir notamment Changes in the Land : Indians, Colonists, and the Ecology of New England). [EM]
Jean-Baptiste Fressoz. Historien des sciences, des techniques et de l’environnement, Fressoz contribue à la pensée de l’anthropocène (l’époque de l’histoire identifiée par la trace laissée par les activités humaines dans la stratigraphie, et caractéristique de l’empreinte irréversible de l’humanité sur son environnement). Il critique la dépolitisation de ce concept dans L’événement anthropocène : la Terre, l’histoire et nous (2013, avec Christophe Bonneuil) : unifiant l’espèce humaine dans une responsabilité de la crise environnementale, il produit des catégories et des récits qui occultent les rapports économiques, sociaux, coloniaux qui ont déterminé le changement climatique. Dans L’Apocalypse joyeuse, une histoire du risque technologique, (2012), il propose une histoire du risque technologique, montrant que les acteurs positivistes et industriels du XIXe siècle s’employèrent, tout en ayant clairement conscience des risques, à « ajuster le monde à l’impératif technologique ». [EM]
Avec "Effondrement", Jared Diamond s'impose comme le premier penseur de la collapsologie.• Crédits : MARCELLO MENCARINI / Leemage - AFP
Les « collapsologues »
Jared Diamond (1937). Auteur au succès planétaire, Jared Diamond n’est pas à proprement parler un collapsologue. Scientifique de haut niveau (biologiste évolutionniste, physiologiste et géonomiste), professeur à Harvard et par la suite à UCLA, il raconte cependant l’histoire de l’ « effondrement » des sociétés humaines, pour reprendre le titre de son best-seller, intitulé justement Collapse en anglais. (Voir : Effondrement : Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie). [FM]
Pablo Servigne (1978). Avec ses compagnons Raphaël Stevens et Gauthier Chapelle (mais aussi Yves Cochet et de nombreux autres), Servigne est le visage et la voix les plus connus de ce courant de l’écologie contemporaine francophone que lui-même a contribué à appeler « collapsologie ». Depuis la publication du best-seller Comment tout peut s’effondrer (2015), sa pensée de l’imminence d’un effondrement radical de nos systèmes insoutenables a gagné de plus en plus de place dans les débats médiatiques et politiques : des podcasts aux chaînes YouTube en passant par les plateaux télé et même Bercy, l’arène publique a convoqué et discuté de plus en plus souvent le discours collapsologique. [JR]
Au croisement de l’écologie et des médias
Fabrice Flipo (1972). Entouré par d’autres chercheuses et chercheurs en sciences sociales, Fabrice Flipo a mené d’importantes enquêtes autour des coulisses écologiques des technologies de communication (numériques, en particulier) qui prolifèrent dans nos sociétés appareillées. Au cœur de ses travaux (comme Écologie des infrastructures numériques et La face cachée du numérique) est rendue visible toute une série de sujets croisant environnement et médias, comme les coûts énergétiques, les extractions minérales et les déchets toxiques de l’univers connecté. [JR]
Yves Citton (1962). D’abord théoricien de la littérature et de la pensée du siècle des Lumières, Yves Citton a récemment élaboré – dans son infatigable nomadisme intellectuel – une série de travaux précieux qui entretissent les problèmes de l’écologie à ceux des médiations (à savoir, des techniques des communications). Toujours animé par un questionnement politique sur nos communautés sociales, techniques et esthétiques. En attendant la sortie de son Générations collapsonautes, voir notamment : Renverser l’insoutenable, Pour une écologie de l’attention et Médiarchie. [JR]
Les éco-féministes
Susan Griffin (1943). Poète, dramaturge, écrivaine éco-féministe. Son approche consiste à étudier les liens entre la destruction de la nature, le sexisme et le racisme, notamment dans Woman and Nature: The Roaring Inside Her (1978). [EM]
Françoise d’Eaubonne (1920-2005). Romancière et essayiste prolifique, François d'Eaubonne était avant tout féministe. Elle a cofondé le Mouvement de libération des femmes (MLF) puis le Front homosexuel d’action révolutionnaire (Fhar). Sa prise de conscience écologiste progressive, imprégnée du rapport Meadows Limits to growth («Limites à la croissance») de 1972 et des idées de Serge Moscovici, la pousse à mener de front ces deux combats. Elle opère dès 1974 la synthèse entre la dénonciation de l’exploitation de la nature par l’Homme et l’exploitation de la femme par l’homme. C’est dans Le féminisme ou la mort (Éd. P. Horay) qu’apparaît pour la première fois le terme d’ « écoféminisme » qui sera ensuite repris par les militantes étasuniennes, anglaises ou indiennes dans les années 1980. Au cœur de sa théorie écoféministe se trouve la dénonciation de «l’illimitisme de la société patriarcale», qui pousse tant à l’épuisement des ressources qu’à une «surfécondation de l’espèce humaine». C’est dans ce contexte qu’elle pose comme premier fondement de l’écoféminisme la reprise en main de la démographie par les femmes et défend le droit à la contraception, à l’avortement, aussi bien que l’abolition du salariat et de l’argent, dans une logique de décroissance économique autant que démographique. Elle influence des penseuses comme Vandana Shiva, Maria Mies et Starhawk. [ZS]
Starhawk [Miriam Simos] (1951). Protagoniste du mouvement altermondialiste, elle a incarné également la lutte et les théories éco-féministes. La crise écologique nous renvoie, selon Starhawk, aussi bien à un système économique capitaliste nocif qu’à des paradigmes culturels de domination et de rationalisation, où l’histoire du genre – masculin, bien entendu – joue un rôle non négligeable. Sa pensée nous permet aussi de prendre au sérieux les gestes sorciers et l’imaginaire néo-païen si répandu dans certains milieux écologistes. Commencer par Rêver l’obscur . [JR]
Joanna Macy (1929). Militante écologiste, pionnière de l’« éco-psychologie ». Dans Écopsychologie pratique et rituels pour la Terre, elle s’inspire des théories du bouddhisme et de l’approche systémique pour développer un autre rapport à soi et à la nature. [EM]
Émilie Hache. Jeune philosophe et théoricienne de l’écologie vouée à la rencontre entre questions environnementales, cultures militantes et pensée féministe. Hache a coordonné plusieurs ouvrages comme Reclaim (2011), qui ont contribué à renouveler le corpus du questionnement autour de l’écologie politique. [JR]
La militante écologiste brésilienne Marina Silva en campagne pour la présidentielle en 2014.• Crédits : Miguel Schincariol - AFP
Les politiques et syndicalistes
Gifford Pinchot (1865-1946). Homme politique passionné par la vie au grand air, la pêche à la ligne, les insectes, les forêts, il vécut quelques temps au contact de la « wilderness » qui lui donna la volonté de protéger l’environnement. Après ses études à Yale, il fut le premier à introduire la foresterie aux États-Unis. De sa formation en sylviculture, il conserva la certitude que la forêt pouvait être le fruit d’une culture des arbres méticuleuse, sur le modèle du « tree farming », et fondée sur un modèle économique rentable et soutenable, contre l’exploitation déraisonnée des ressources naturelles. En sa qualité de gouverneur, il défendit ses idées pendant de longues années et devint le premier chef du Service des forêts des États-Unis. De fait, il appartient au courant de pensée du conservationnisme, qui défend la nécessité de gérer les ressources naturelles que nous exploitons dans notre propre intérêt. C’est le mouvement auquel souscrira plus tard la ligne des partisans du développement durable. [NMM]
Chico Mendes (1944-1988). Le célèbre leader syndical brésilien, qui fut l’un des défenseurs pionniers de la forêt amazonienne et du travail des seringueiros (les ouvriers agricoles cultivateurs du latex), a été assassiné pour ses idées. Longtemps, son combat s’est articulé à l’intersection des questions syndicales, indigènes et écologiques, au nom des communautés autochtones qui possédaient leurs terres ou de la critique des lobbies de l’exploitation de l’Amazonie par les grands propriétaires terriens ou les géants de l’agro-business. Depuis son assassinat, ses idées n’ont cessé d’influencer la pensée écologique brésilienne et notamment tous les défenseurs de l’Amazonie. (voir : Chico Mendes, Mon combat pour la forêt). [FM]
Alfredo Sirkis (1950). Ancien député du Brésil, le journaliste Alfredo Sirkis a pris la tête en 2019 d’un mouvement en faveur de l’environnement et contre le président Bolsonaro, qui se construit notamment autour des gouverneurs d’une dizaine d’États. Sirkis a été l’un des défenseurs des politiques de reforestation au Brésil et a développé l’idée d’une valeur économique du « moins carbone » (concept du « carbon positive pricing ») ou encore celle des « blended finances » (garantie publiques offertes aux banques si elles défendent des projets verts). Peu après sa prise de fonction, le président Bolsonaro a démissionné Sirkis de son poste clé de « Coordinator of the Brazilian Forum for Climate Change » (FBMC). Depuis, il est directeur du think tank Brazilian Climate Center (CBC). Auparavant, ce député des Verts brésiliens (élu de 2011 à 2014) avait été candidat à la présidentielle de 1998. Sirkis a publié plusieurs livres dont le best-seller sur l’environnement Os Carbonários et, à paraître, Descarbonario. [FM]
Marina Silva (1958). Ayant grandi dans une famille de seringueiros (cultivateurs du latex) dans un petit village de l’Acre de la région amazonienne, jeune orpheline et ancienne femme de ménage, Marina Silva est devenue une championne de l’écologie au Brésil. Elle a, d’une certaine façon, repris le flambeau après l’assassinat du leader syndical Chico Mendes. Femme politique de premier plan depuis les années 2000 (ministre de l’écologie du président Lula, candidate malheureuse à la présidentielle en 2014 et, surtout, en 2018), elle connaît aujourd’hui un fort désaveu populaire. Ses positions évangéliques conservatrices sur les questions de mœurs et de famille ont pu être critiquées mais, au sein du protestantisme brésilien, elle joue un rôle majeur en incarnant une voix écologique alors que les évangéliques, qui constituent une partie significative de l’électorat de Bolsonaro, sont souvent réticents à embrasser les thèmes écologiques ou se montrent peu désireux de protéger la forêt amazonienne. [FM]
Al Gore (1948). Depuis sa défaite inattendue à la présidentielle de 2000, Al Gore a dédié une partie de sa carrière à l’écologie. Son combat contre le réchauffement climatique passe notamment par son ONG (l’Alliance for Climate Protection) et par une multitude d’initiatives en faveurs d’une réforme de l’ordre monétaire et bancaire international pour tenir compte de la dimension écologique et des émissions des gaz à effet de serre (via le fond d’investissements Generation Investment Management LPP notamment). Il a co-obtenu, avec le GIEC (Groupe d'experts inter-gouvernemental sur l’évolution du climat), le prix Nobel de la paix en 2007 pour son engagement dans la lutte contre les changements climatiques. (Al Gore, Choisir maintenant, Une vérité qui dérange et Urgence Planète Terre). [FM]
Rachel Carson en 1962. Son livre "Le Printemps silencieux" a marqué l'histoire de l'écologie.• Crédits : Alfred Eisenstaedt - Getty
Les scientifiques : chimistes, biologistes, géographes, géologues…
Svante August Arrhenius (1859-1927). Chimiste suédois, qui fut le premier à établir un lien, dans un article publié en 1896 (« De l'influence de l'acide carbonique dans l'air sur la température au sol »), entre concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère et augmentation de la température terrestre, soit le désormais bien connu « effet de serre ». [EM]
Rachel Carson (1907-1964). Scientifique de haut niveau, rattachée à une agence fédérale américaine, Rachel Carson fut l’une des femmes précurseures de la question écologique aux États-Unis. Avec son livre Printemps silencieux (Silent Spring, préface de Al Gore), elle a livré une analyse précoce sur le danger du DDT et des pesticides. Son influence fut déterminante, donnant naissance à un véritable mouvement social en faveur de l’environnement aux États-Unis et à la création d’agences dédiées, aujourd’hui fort menacées. [FM]
Élisée Reclus (1830-1905). Géographe, membre actif du mouvement anarchiste, il a forgé une géographie humaine totale, décrivant dans La Terre (1868) les phénomènes de la vie du globe et le rôle qu’y joue l’homme, bénéfique comme néfaste. Les dix-neuf volumes de La Nouvelle Géographie universelle : la terre et les hommes représentent son grand-œuvre, une encyclopédie d’une géographie totale. [EM]
James Lovelock (1919). Géophysicien, il a développé avec la biologiste Lynn Margulis le concept « Gaïa » dans plusieurs livres (Les Âges de Gaïa ; La Terre est un être vivant, l’hypothèse Gaïa). « Gaïa » entend décrire la particularité de la planète Terre, qu’un certain nombre d’êtres vivants ne font pas qu’habiter, en subissant la pression d’un milieu (dans une conception darwinienne), mais l’ajustent aussi en retour, la transforment pour la rendre plus propice à la vie. Selon Lovelock, la Terre n’est pas un bloc de matière, un donné pur, c’est avant tout un vaste organisme, vivant et rétroactif. « Gaïa » permet ainsi de dépasser la frontière entre sujet et objet, animé et inanimé, vivant et inerte, et de concevoir la vie comme un processus physique autorégulateur, un vaste système symbiotique. [EM]
Lynn Margulis (1938-2011). Microbiologiste américaine, elle a bouleversé la biologie contemporaine avec sa théorie de l’origine endosymbiotique des cellules eucaryotes. Elle a mis en avant la dimension évolutive des interactions symbiotiques entre des organismes d’origine phylogénétique différente. Elle est également connue pour avoir créé avec James Lovelock le concept « Gaïa ». (Voir notamment : L’Univers bactériel. Les nouveaux rapports de l’homme et de la nature, avec Dorion Sagan).
Jean Jouzel (1947). Climatologue et glaciologue, membre du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), il a notamment étudié les évolutions passées et futures du climat de la terre. Jean-Jouzel est une figure renommée de l’alerte scientifique quant au réchauffement climatique. (Voir : Climats passés, climats futurs).
Les théologiens
Leonardo Boff (1938). A l’origine, le prêtre brésilien Leonardo Boff est un « théologien de la libération ». Avec des figures majeures comme le péruvien Gustavo Gutiérrez, l’espagnol-salvadorien Jon Sobrino ou, plus tard, le brésilien Frei Betto, Boff contribue à imaginer une théologie à la fois post-marxiste et catholique, engagée pour une plus grande justice sociale, et qui place en son cœur l’« option préférentielle pour les pauvres ». Après avoir longtemps été prêtre en Amazonie, et avoir vécu au contact des populations indigènes, il a eu une violente opposition avec le pape Jean-Paul II et, surtout le cardinal Ratzinger, au point qu’il quittera les ordres et se mariera finalement. Dans les années 1980, le (toujours) théologien Boff se met à penser, à partir de la Bible, le statut de la terre. Exploitée, et même « crucifiée », la Terre doit être protégée comme « maison commune » voulue par Dieu. Ce faisant, Boff contribue à l’évolution de la Théologie de la libération, et bientôt de toute l’église catholique, vers l’écologie. Il publie plusieurs livres majeurs sur le sujet et est l’une des sources principales, sinon l’un des rédacteurs, de l’encyclique Laudato’ Si sur l’environnement du pape François. A ce titre, celui qui a reçu le prix Nobel alternatif en 2001, est aujourd’hui l’un des penseurs de l’écologie les plus importants, ses idées influençant désormais des millions de catholiques à travers le monde. (Voir : Leonardo Boff, La Terre en devenir ou ses livres, non traduits en français, Toward an Eco-Spirituality et Essential Care : An Ethics of Human Nature) [FM]
Gaël Giraud (1970). Docteur en mathématiques et prêtre-théologien catholique, il fut chef économiste de l’Agence française de développement (2015-1019). Il s’intéresse aux financements de la transition écologique et au fonctionnement de l’économie de marché (croissance, PIB, banques, IPO…) en proposant des modèles qui intègrent les enjeux écologiques. [FM]
Jean Bastaire (1927-2013). Penseur de l’écologie chrétienne, hostile à la société de consommation et à l’hérésie productiviste. Il promeut une « charité cosmique » entre les hommes et toutes les créatures terrestres. Dans Pour un Christ vert (2009), il appelle à une écologie spirituelle et sobre, respectueuse de la création, l’inscrivant dans toute une histoire de l’Église : « Christ vert, cette expression étrange est calquée sur le Christ socialiste du XIXe siècle, Christ ouvrier et Christ des barricades qui malheureusement échoua […]. L’Église du XXIe siècle va-t-elle rater à nouveau le rendez-vous ? » Voir également : Pour une écologie chrétienne, 2004. [EM]
Greta Thunberg : une adolescente pour incarner la jeunesse écologiste.• Crédits : Frederic J. BROWN - AFP
Les activistes
Greta Thunberg (2003). Si elle a publié quelques textes, préfaces ou livre, Greta Thunberg n’est pas à proprement parler une « intellectuelle » de l’écologie. Cependant, le parcours et les prises de position radicales récentes de la jeune activiste suédoise ont une influence considérable sur le débat global autour des enjeux climatiques. A la tête de la Skolstrejk för klimatet (« grève scolaire pour le climat »), celle qui a été en couverture du magazine Time – une preuve, à tout le moins, de son influence –, a donné naissance à un véritable mouvement social international. Si elle suscite des critiques également radicales, son combat va dans le sens d’une prise en compte de l’urgence des enjeux écologiques et climatiques. De fait, elle est devenue une icône de ce combat. (Greta Thunberg, Scènes du cœur). [FM]
Naomi Klein (1970). L’essayiste altermondialiste canadienne, auteure de best-sellers contre le néolibéralisme et la mondialisation économique (No Logo, La stratégie du choc) est devenue célèbre plus récemment comme activiste écologique avec son livre Tout peut changer : capitalisme et changement climatique (2014). Elle y défend l’idée que la transition écologique est incompatible avec l’organisation capitaliste de la société et dénonce les discours climato-sceptiques, parfois nourris par des conflits d’intérêts économiques. Elle dénonce aussi le green-washing de certains acteurs prétendument écolos ou des banques. Si l’ouvrage a fait l’objet de critiques pour avoir instrumentalisé la cause écologique au profit de ses idées anti-capitalistes, l’essayiste a eu néanmoins le mérite de permettre à une partie de la gauche radicale de se convertir à la question climatique. [FM]
Pierre Rabhi (1938). Figure controversée du mouvement écologiste français, Rabhi est un agriculteur qui milite pour l’agro-écologie et la « sobriété heureuse ». Il fut le fondateur du mouvement Colibris. Grâce à des techniques agricoles alternatives et à des idées à la fois futuristes et conservatrices sur un retour à la terre idéalisée, il a su conquérir une certaine audience. Dans une enquête du Monde Diplomatique qui a fait date, le journaliste Jean-Baptiste Malet a critiqué ses idées ultra-conservatrices, ses propos pseudo-scientifiques et ses liens avec la droite extrême ; Pierre Rabhi a répondu dans un droit de réponse. (Voir parmi les nombreux livres de Pierre Rabhi, Écologie et spiritualité, Terre-Mère, Verslasobriétéheureuse et son recueil d’article Lerecueilà la terre). [FM]
Vandana Shiva (1952). Figure altermondialiste, elle mène avec son organisation Navdanya un combat contre l’agriculture intensive et contre les OGM, dans une défense de la biodiversité et de l’agriculture biologique, des savoirs indigènes et de l’autonomie alimentaire. [EM]
Quelques journalistes
Hervé Kempf (1957). Journaliste spécialisé dans l’environnement, il est le rédacteur en chef du site Reporterre (le quotidien de l’écologie), et l’auteur d’ouvrage sur l’écologie, dont Tout est prêt pour que tout empire. 12 leçons pour éviter la catastrophe. [EM]
Fabrice Nicolino (1955). Journaliste d’investigation (il fut par ailleurs l’une des victimes de l’attentat contre Charlie Hebdo), Nicolino a signé plusieurs enquêtes décisives sur l’environnement depuis son Tour de France d’un écologiste (1993). On lui doit notamment une enquête majeure sur les pesticides (2007) et une autre sur l’industrie de la viande (Bidoche, 2009). Auteur d’une vingtaine d’ouvrages sur les questions écologiques, il est également à l’origine d’une campagne avec Charlie Hebdo en faveur de l’interdiction des pesticides (« Nous voulons des coquelicots »). [FM]
Eugénie Bastié (1991). Journaliste « bioconservatrice » qui publie notamment dans Le Figaro, Eugénie Bastié a été l’une des fondatrices en 2015 de la revue Limite dont le sous-titre est : « Revue d'écologie intégrale ». Ainsi, cette catholique affirmée s’inscrit dans un groupe de jeunes intellectuels qui tentent de refonder une écologie de droite sur de nouvelles bases. [FM]
Les artistes
Ernst Haeckel (1834-1919). Biologiste étudiant les relations entre un organisme vivant et son milieu, on lui doit l’invention du mot « écologie ». Mais c’est surtout pour ses Formes originaires de la nature (1904), véritable traduction artistique de la révolution darwinienne, que l’on se souvient de lui : cette suite de lithographies où cohabitent les formes parfaitement symétriques d’insectes et de fleurs, de planctons et de coraux, de reptiles et de méduses, témoigne d’une époque où art et science ne s’excluaient pas dans l’observation minutieuse et la contemplation esthétique du monde. [EM]
Bernie Krause (1938). Musicien spécialisé dans la « bioacoustique », il a brossé des « paysages sonores » en enregistrant les cris et les bruissements des animaux, dans une invitation à prêter l’oreille à ce qui n’est pas un simple bruit de fond, mais la splendeur acoustique de notre monde, dans laquelle nous baignons. Une œuvre entre émerveillement et inquiétude, car les 4 500 heures d’enregistrement de Bernie Krause témoignent aussi de la disparition massive d’espèces, de leur extinction sonore… Il a été rendu célèbre en France avec son exposition à la Fondation Cartier : « Le Grand Orchestre des Animaux » en 2017. [EM]
Robert Smithson (1938-1973). Grande figure du Land Art, courant artistique qui investit des environnements naturels pour créer des œuvres arrachées au monde social et rendues aux éléments, Smithson est notamment connu pour Spiral Jetty (1970), située au nord du Grand Lac salé dans l’Utah : une spirale, faite de roches, de sel et d’algues, partant du rivage comme une excroissance, se dérobe au regard du spectateur par son immensité et par son inscription dans le temps long de la Terre. [EM]
Pierre Huyghe (1962). Cherchant à développer des œuvres-écosystèmes, autonomes de l’intervention des spectateurs, Huyghe élabore des installations qui continuent à « vivre » en-dehors du temps de l’exposition, donnent naissance à des mondes à part. Dans Zoodram 4 (2011) par exemple, un aquarium rempli de pierres ocres loge un bernard-l'ermite dont la coquille est une reproduction de la sculpture La Muse endormie de Constantin Brancusi. Il invite aussi à penser notre propre extinction, notamment dans la vidéo Human Mask (2015), où un singe affublé d’un masque blanc se promène dans un restaurant japonais déserté, un univers post-Fukushima dans lequel l’humanité est réduite à cette figure d’inquiétante étrangeté. [EM]
Olafur Eliasson (1967). Militant écologiste, le plasticien danois crée la plupart de ses œuvres en prise direct avec l’urgence environnementale. Eliasson a ainsi invité la banquise à l’occasion de l’ouverture de la COP21 en 2015 avec son intallation Ice Watch. En disposant des morceaux d’icebergs venus du Groenland place du Panthéon à Paris, ces blocs de glace, devenus symboles du réchauffemement climatique, ont fondu sous les yeux des passants. Il n’en est toutefois pas à son premier coup d’essai dans les interventions spectaculaires. Dès la fin des années 1990, il injecte de l’uranine dans plusieurs fleuves, un colorant non toxique, donnant une couleur vert fluorescent aux eaux. Sans avertissement préalable, les rivières se sont métamorphosées en coulées irradiantes et inquiétantes. Une mise en garde contre la pollution des industries, très souvent invisible dans les cours d’eau. [DP]
Dans "Ponyo sur la falaise" de Miyazaki la nature se déchaîne, les fonds marins se déversent sur la côte.
Les cinéastes
Hayao Miyazaki (1941). Figure incontournable du cinéma d’animation japonais, son œuvre est parcourue par un grand souffle animiste (c’est-à-dire l’idée que tous les éléments qui composent le monde sont dotés d’une intériorité, d’une puissance d’agir), mettant en scène des sociétés en conflit avec leur environnement et la difficile cohabitation des êtres au sein d’un même espace, de la forêt toxique qui envahit la surface du globe dans Nausicaä de la vallée du vent, aux fonds marins prêts à déferler en vagues destructrices dans Ponyo sur la falaise, en passant par la guerre entre les hommes et les divinités de la nature dans Princesse Mononoké. [EM]
Terrence Malick (1943). Le cinéma de Malick est habité par un panthéisme majestueux, célébrant l’Éden perdu qu’est la nature. Ses films rejouent toujours la possible fusion entre l’homme et cette nature mythique des origines, héritée du transcendantalisme américain de R. W. Emerson et de H. G. Thoreau. Un idéal susceptible d’être balayé par les guerres (La Ligne rouge), les conquêtes (Le Nouveau monde) ou les drames intimes et existentiels (The Tree of life)… [EM]
Agnès Varda (1928-2019). La malicieuse cinéaste n’a eu de cesse de prendre au sérieux les objets naturels qui nous entourent : des patates difformes qui ne se vendent pas (Les Glaneurs et la glaneuse) aux platanes malades qui finiront abattus comme la vagabonde Sandrine Bonnaire (Sans toit ni loi), en passant par les tournesols qui suivent le soleil sans égard pour le possible malheur qui se trame derrière eux (Le Bonheur), la nature n’est pas qu’affaire de décor, mais joue un rôle essentiel dans les histoires humaines. [EM]
[…]
SANS OUBLIER ceux auxquels nous avons également pensé mais sans encore leur consacrer une notice : l’économiste Jean-Charles Hourcade ; les journalistes Paul Piccarreta et Marianne Durano ; l’artiste Ai Weiwei ; l’historien de l’art Paul Ardenne ; l'historienne Frédérique Aït-Touati ; les collapsologues Raphaël Stevens et Gauthier Chapelle ; les philosophes Maurice Merleau-Ponty, Jean-Pierre Dupuy, John Baird Callicott ou Emanuele Coccia ; la féministe Silvia Federici ; le zoologiste Adolf Portmann ; la poétesse Fabienne Raphoz ; l’historienne de la littérature Marielle Macé, l’activiste Derrick Jensen, etc.
• Cette petite bibliothèque idéale de l’écologie a été rédigée par les rédacteurs suivants : Christophe Fourel (CF), Nathan Marcel Millet (NMM), Frédéric Martel (FM), Etienne Miqueu (EM), Jacopo Rasmi (JR), Zoé Sfez (ZS) et David Pata (DP).
• Merci pour leurs conseils ou leurs relectures à Frédérique Aït-Touati, Yves Citton, Aurélie Filippetti, Christophe Fourel, Elliot Lepers,Arnaud Montebourg et Patrick Viveret.
LES RÉSEAUX SOCIAUX
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Le mieux est de faire référence à son site : http://www.guibertdelmarmol.com/. On peut y lire « de San Francisco à Bombay en passant par la forêt amazonienne et les campagnes européennes, Guibert del Marmol parcourt la planète au contact des entrepreneurs qui changent le monde et réconcilient les notions d’économie, d’écologie et de sens. Ancien dirigeant d’entreprise, il est aujourd’hui conseiller, auteur et conférencier en matière d’économie positive. Il est actif à la fois dans les domaines de l’innovation, de la durabilité et de l’investissement responsable ».
Son parcours l’a amené à développer une pensée latérale et a changé sa perception de l’entreprise qui, pour lui, ne doit plus fonctionner selon le modèle de la maximisation du profit, mais celui de création de valeurs partagées.
Il a alors développé devant un auditoire très attentif, l’émergence d’une économie régénératrice (voir image). Le principe étant de créer plus de valeur qu’on en consomme.
Que recouvrent les différents concepts de cette économie régénératrice ?
Sous le vocable « G(Local) », contraction de global et local, Guibert del Marmol évoque une économie alimentaire et énergétique locale avec création de ceintures vertes autour des villes, agriculture urbaine, … tout en restant connecté au monde.
Par « collaborative », il entend la création de plateformes d’échange, l’utilisation de l’intelligence collective, et le concept d’une économie des communs (qui appartient à la communauté).
Par « fonctionnelle », il envisage une économie qui verra se développer le principe de location des biens au lieu de leur achat (voitures mais aussi frigo en visant la durabilité et en mettant fin, par la force des choses, à l’obsolescence programmée).
Et évidemment, cette économie ne pourra qu’être « circulaire » c’est-à-dire basée sur une logique de recyclage permanent.
Après avoir développé les clés de la réussite qui, selon lui, englobent une vision intégrale dans des organisations agiles qui utilisent l’intelligence collective et la gestion holistique, Guibert del Marmol s’est attaché à donner sa vision de l’agriculture du futur en fonction de ses diverses observations dans le monde.
Selon lui, l’agriculture du futur sera un mélange de permaculture, d’agroécologie, d’agriculture microbienne et d’agriculture de précision, entre autres. L’objectif étant de nouer les deux systèmes, ancien et nouveau, pour changer le modèle de l’agriculture qui doit s’adapter.
Et s’il devait la résumer, l’agriculture de demain sera
Relocalisée
Efficace
Régénératrice
Résiliente
Compatible et symbiotique
Communicante
Prestigieuse
Pour finir, Guibert del Marmol a résumé ce qui l’anime aujourd’hui, qui lui appartient et lui est propre mais qu’il a envie de partager. Pour lui, il faut challenger les dogmes, développer une pensée latérale et avoir une écologie intérieure
Même si le chemin à parcourir dépendra de notre approche et notre sensibilité, cette conférence a ouvert des réflexions dans un monde fortement critiqué mais qui évolue. Et si vous voulez approfondir ces réflexions, vous trouverez sur le site mentionné plus haut la référence d’ouvrages écrit par Guibert del Marmol.
Je vous invite à participer à un atelier de créativité destiné aux habitants de Paris Centre pour se réapproprier la ville et mieux vivre dans son quartier #mieuxvivre#ecologie#jensuis
Cette initiative vise à donner la parole aux habitants de Paris Centre pour faire émerger des idées nouvelles à communiquer aux élus. Des idées qui émanent directement des citoyens. Des idées qui transcendent les agendas politiques.
Ces ateliers auront lieu le samedi 3 avril de 14h à 17h via ZOOM et les animateurs feront germer les idées à partir de la fresque renaissance écologique, une fresque qui permet à chacun de se projeter dans le monde des solutions à court et moyen terme.
Nous souhaitons que les idées débouchent sur des projets qui soient mises en œuvre dans une volonté collective. C’est pourquoi, les idées qui émergeront seront communiquées aux partis politiques et associations écologistes sur Paris ainsi qu’aux élus concernés.
Pour participer à cet atelier et reçevoir le lien de connexion, merci de compléter le formulaire ci-dessous ! https://lnkd.in/eCNXZMg
Pour la théorie de l’Acteur-réseau, le succès ou l’échec d’un projet innovant ne dépend pas des caractéristiques intrinsèques d’une innovation mais d’un réseau capable de lier ensemble des « actants » hétérogènes. Les onze chapitres de l’ouvrage « Sociologie de la traduction, textes fondateurs » (Akrich, Callon, Latour 2006) sont aujourd’hui en ligne.
1. L’innovation dans (et par) un Acteur-réseau: les « Actants » et les traductions successives
Destinée au départ à l’étude de l’innovation dans les réseaux scientifiques (voir Callon et Ferrary, 2006), la Sociologie de la traduction est aussi appelée ANTActor-Network Theory (voir Akrich, Callon et Latour, 1998, 2006), car :
elle remplace la soi-disant pureté des » faits » et innovations scientifiques par la réalité de traductions successives entre différents registres en présence (comme par exemple dans le cas de la voiture électrique : traductions entre les logiques techniques, sociales, économiques et organisationnelles, voir Callon 1979);
elle remplace la soi-disant pureté de l’organisation par la réalité de réseaux hétérogènes produits par des « actants » : des actants humains, mais aussi des actants non-humains (la technologie, les lieux, les dispositifs…), voir La sociomatérialité. Un réseau technico-économique est lui-même un actant, quand il devient un tourbillon créateur dans lequel « la mayonnaise de l’innovation » peut prendre corps (comme dans le cas « fondateur et historique » de la domestication des coquilles St Jacques et des marins-pêcheurs, voir Callon 1986) ou ne pas prendre corps (comme par exemple dans le cas du photo-voltaïque, voir Akrich, Callon et Latour, 2006). Voir cette vidéo de présentation, qui met notamment l’accent sur le rôle des objets-frontières dans la construction d’une innovation:
2. Le tourbillon de l’innovation, la mobilisation des Actants à travers les controverses
L’innovation n’apparaît pas ici comme une diffusion linéaire (comme dans l’analyse de E. Rogers avec la Théorie de la diffusion), mais comme le résultat complexe d’une interaction entre des partenaires hétérogènes. Il s’agit alors d’identifier les jeux de mobilisation des actants qui participent à l’élaboration de l’innovation. Le réseau, lui-même considéré comme un acteur-actant, est un dispositif d’intéressement :
dans un premier temps (la problématisation et les alliances), il s’agit de prendre en compte, dès le début d’un projet, l’ensemble des actants concernés par le projet. Les entités humaines (directions, utilisateurs, prestataires techniques, spécialistes…) comme les entités non-humaines, (objets, outils, dispositifs…), tous participent conjointement à la construction de l’innovation (voir Rorive 2003, voir Barbier et Trépos 2007);
dans un deuxième temps (l’intéressement et l’enrôlement), il s’agit d’identifier les acteurs appelés à jouer le rôle clé de porte-paroles, c’est-à-dire capables de « traduire » les différents intérêts en présence d’un registre à l’autre (logique technologique vers logique de métier, par exemple) : voir Hussenot (2006) sur les « boucles d’intéressement », voir Walsh et Renaud (2010) sur le « changement traduit » (voir dans Conduite du changement);
dans un troisième temps (la mobilisation), le réseau se consolide ou s’affaiblit en fonction des épreuves de force qui s’engagent. Il s’agit alors de les identifier, à travers les différentes controverses qui marquent le réseau (voir Baillette et al. 2012). La controverse est ici décrite comme un mode d’expression des groupes concernés : expression de leurs intérêts et de leurs identités, mise à plat des problèmes posés et des solutions envisageables, reformulation des objectifs. Les controverses (et les compromis) sont alors des repères pour identifier la dynamique du réseau et l’évolution de sa convergence ou de sa divergence : voir la thèse de S. Missonier en 2008 ou sa publication dans Meier et al. en 2012.